Dans le monde dynamique de l’entrepreneuriat, deux décisions récentes du Conseil d’État ont mis en lumière un outil essentiel pour les start-ups : les Bons de Souscription de Parts de Créateur d’Entreprise (BSPCE). Une analyse approfondie de ces décisions semble cruciale, car elles pourraient avoir des répercussions significatives sur l’ensemble du paysage entrepreneurial français.
En effet, ces deux décisions, rendues en quelques semaines, ont invalidé la Doctrine BOFIP-Impôts. La première décision, du 8 décembre 2023, a remis en cause un commentaire de l’administration fiscale qui interdisait le placement des titres résultant de l’exercice des BSPCE dans un Plan d’Épargne en Actions (PEA). La seconde, du 5 février 2024, a concerné une doctrine administrative qui refusait le bénéfice du sursis d’imposition de l’article 150-O B du CGI en cas d’apports de titres issus de l’exercice de BSPCE à une holding non contrôlée par l’apporteur.
L’enjeu est principalement fiscal. Les entrepreneurs et dirigeants d’entreprises ont besoin d’un cadre réglementaire stable. Or, un environnement instable pourrait fragiliser le dispositif des BSPCE, sur lequel le gouvernement a beaucoup misé. L’objectif des BSPCE est de fournir une incitation à la fois financière et fiscale pour encourager les salariés et les dirigeants à participer au développement de leur entreprise.
I. Fonctionnement des BSPCE
Les BSPCE sont des titres attribués par une société par actions (SA, SCA, SAS) à un bénéficiaire désigné, lui permettant de souscrire, dans un cadre fiscal favorable, des actions de la société de manière différée dans le temps et à un prix fixé à l’avance. Ce dispositif est réservé aux sociétés jeunes et de petite taille : sociétés non cotées (ou de capitalisation boursière inférieure à 150 millions d’euros) et immatriculées au RCS depuis moins de 15 ans.
Le fonctionnement des BSPCE se déroule en trois phases : l’attribution des bons aux collaborateurs, l’exercice des bons par les collaborateurs, et la vente des actions acquises par les collaborateurs. Un calendrier d’exercice ou “vesting” peut être établi : les BSPCE sont attribués de manière progressive, en fonction du temps passé au sein de l’entreprise.
Les BSPCE sont utilisés comme une formule de complément de rémunération pour les salariés ou les mandataires sociaux de la société. La revente de l’action permet au bénéficiaire de réaliser une plus-value, d’autant plus avantageuse que l’entreprise a prospéré entre-temps.
II. Fiscalité des BSPCE
Les BSPCE ont une fiscalité particulière. Le taux d’imposition de la plus-value réalisée dépend de l’ancienneté du bénéficiaire dans l’entreprise (plus ou moins de 3 ans). Dans tous les cas, 17,2 % de prélèvements sociaux doivent être ajoutés.
III. Éligibilité des titres issus des BSPCE au PEA
La question de l’éligibilité des titres issus des BSPCE au PEA a été tranchée par le Conseil d’État dans son arrêt du 08/12/2023. Le Conseil d’État, en interprétant strictement les dispositions du Code monétaire et financier, a affirmé l’éligibilité au PEA des titres issus des BSPCE, à condition que ces titres relèvent des catégories mentionnées et qu’ils ne figurent pas dans la liste des titres ne pouvant pas être inscrits dans un PEA.
IV. Les détenteurs de BSPCE et le régime du sursis d’imposition
Le second arrêt du Conseil d’État, du 5 février 2024, traite des apports de titres issus de l’exercice des BSPCE. Le Conseil d’État a annulé les commentaires administratifs qui refusaient aux titres issus de l’exercice des BSPCE la possibilité, en cas d’apport à une société non contrôlée par l’apporteur, de bénéficier du régime du sursis d’imposition visé à l’article 150-0B du CGI.
Ces deux décisions contribuent à sécuriser, dans une certaine mesure, le cadre fiscal relatif aux BSPCE, que le législateur a voulu faire un régime de faveur.