La rupture conventionnelle du contrat de travail, instituée par la loi n°2008-596 du 25 juin 2008 (codifiée aux articles L. 1237-11 à L. 1237-16 du Code du travail), est un nouveau mode de rupture autonome qui présente tant des garanties pour le salarié qu’une sécurité pour l’employeur. Ce dernier point est encore plus appréciable dans un contexte de cession d’entreprises.
Un licenciement opéré par le cédant peut être contesté par l’employé après la cession auprès du cessionnaire pour divers motifs, notamment celui fondé sur l’article L.1224-1 du Code du travail (texte d’ordre public suivant lequel les contrats de travail des salariés attachés à l’activité cédée doivent être transférés au repreneur). Ce point est en général traité dans la garantie de passif consentie par le cédant au cessionnaire.
La rupture conventionnelle vs. le licenciement pour motif personnel permet ainsi de circonscrire l’étendue de la garantie de passif dès lors que la rupture conventionnelle ne peut pas, en principe, être remise en cause.
La rupture conventionnelle est un mode de rupture autonome des CDI et donc exclusive de la démission ou du licenciement, qu’il soit individuel ou collectif, ce qui interdit également l’articulation indirecte de son régime avec celui du licenciement économique (départs négociés dans le cadre de PSE et accords de GPEC). Contrairement à une procédure de licenciement, aucun motif n’est nécessaire. La rupture conventionnelle peut faire l’objet d’une rétractation par chacune des parties dans un délai de 15 jours à compter de la signature de la convention.
À l’issue de ce délai de 15 jours, la convention est soumise à la DDTEFP (administration du travail) qui dispose d’un délai de 15 jours ouvrables à compter de la réception de la demande d’homologation pour rendre sa décision (décision explicite d’homologuer la convention, décision explicite de refus d’homologuer la convention ou décision implicite d’homologation en l’absence de réponse de la DDTEFP).
> Avantages pour le salarié
Le recours à la rupture conventionnelle ouvre droit pour le salarié aux avantages suivants :
indemnité spécifique de rupture dont le montant est au moins égal au montant de l’indemnité légale de licenciement ou à l’indemnité conventionnelle de licenciement si celle-ci est plus avantageuse ; indemnité compensatrice de congés payés ainsi que prise en charge par l’assurance chômage.
Chacune des parties dispose toutefois de la faculté de contester la convention ou les conditions de son homologation devant le Conseil de Prud’hommes dans les 12 mois suivant son homologation.
Il semble que la contestation ne puisse avoir pour objet que de soulever le vice du consentement d’une des parties.
La possibilité pour le salarié de contester la convention devant le Conseil de Prud’hommes semble limitée en pratique, ce recours supposant que le salarié démontre au préalable que son consentement a été vicié.
La difficulté pourrait provenir du fait qu’en cas d’échec de la procédure de rupture conventionnelle suivie d’un licenciement, le salarié pourrait alors contester le motif de son licenciement plus facilement. L’employeur doit donc être prudent s’il prend l’initiative de cette procédure.
La sécurité juridique contre les contestations judiciaires attachées à ce mode de rupture peut être trompeuse, notamment dans les cas suivants :
– Harcèlement : le salarié qui a été victime de harcèlement avant de conclure une rupture conventionnelle pourra invoquer ce harcèlement pour faire annuler celle-ci. Les entretiens préalables, l’assistance du salarié et même l’homologation ne suppriment pas les faits de harcèlement, qui établiront, s’ils sont invoqués postérieurement, que le consentement du salarié n’était pas libre ;
– Existence d’un litige entre les parties au moment de la conclusion de la rupture conventionnelle : la Cour de cassation a affirmé qu’une convention conclue entre un salarié et un employeur ne pouvait pas constituer une rupture d’un commun accord en l’état du litige existant entre les parties. Il n’y a pas de raison que la Cour de cassation ne suive pas le même raisonnement en matière de rupture conventionnelle.
> Une transaction pourra être conclue
Ce nouveau mode de rupture présente donc des avantages aussi bien pour l’employeur que pour le salarié et permet d’éviter le recours à des licenciements « arrangés ». Il est toutefois conseillé d’être prudent dans l’utilisation des ruptures conventionnelles et, en particulier, de recourir à cette forme de rupture plutôt lorsque c’est le salarié qui prend l’initiative de la négociation aux fins de rupture. Il est impératif de demander au salarié de formuler par écrit sa demande d’engager une négociation de rupture.
La rupture conventionnelle devant être formalisée au moyen du formulaire CERFA prévu à cet effet, il pourra être utile de prévoir une annexe pour toutes les questions non traitées par le formulaire, notamment en matière d’interdiction de concurrence et/ou de débauchage, d’informations confidentielles…
Enfin, il est important de préciser que la rupture conventionnelle ne peut être assimilée à une transaction. Elle est même incompatible avec celle-ci puisque, par nature, elle intervient en dehors de tout litige. En revanche, une transaction pourra être conclue pour mettre un terme à une éventuelle contestation de la rupture conventionnelle.
Ce mode de rupture semble approprié à des salariés ayant une faible ancienneté à qui aucune faute caractérisée ne peut être reprochée ; dans le cas d’une faute grave, le licenciement sera plus avantageux pour l’employeur, car aucune indemnité de rupture n’est alors due.