De nombreuses entreprises possèdent une trésorerie plus ou moins conséquente. Pour des raisons fiscales, cet excédent ne sera pas distribué aux actionnaires. Certes, le prix de cession se trouvera, dans la plupart des cas, augmenté du montant de la trésorerie. Néanmoins le repreneur a la possibilité de faire remonter la trésorerie excédentaire de la société acquise pour boucler son plan de financement. Mais aussi afin de rembourser sa dette senior.
La remontée de trésorerie avant la reprise
Si la trésorerie de la société opérationnelle est excédentaire, il est logique de prévoir de remonter la trésorerie de sa filiale vers la holding.
Comment le repreneur peut-il procéder ?
Deux possibilités s’offre à lui. Soit on opère une distribution exceptionnelle de dividendes et de réserves distribuables, ou bien on procède à une réduction de capital (non motivée par des pertes).
1-La distribution exceptionnelle de dividende
Dans le cas d’une société mère, soumise à l’impôt sur les sociétés, détenant une filiale à 100%, la distribution de dividendes bénéficie fiscalement, selon le régime » mère-fille « , d’une exonération du produit perçu.
Néanmoins elle sera diminuée de la quote-part de frais et de charges (5% en général, ramené à 1% pour les sociétés membres d’un groupe d’intégration fiscale). La réduction de capital, en dehors de la part représentative du remboursement d’appor, peut également bénéficier du régime mère-fille sous certaines conditions.
Si le « repreneur » est une société soumise à l’IS, qu’elle contrôle sa filiale (idéalement sans minoritaire ou en respect de l’éventuel pacte d’actionnaires), et en dehors de tout abus de majorité; il sera alors possible de réaliser une remontée exceptionnelle de dividendes de la société cible vers la holding de reprise.
Cette opération permet alors de renforcer les fonds propres de la holding d’acquisition. C’est une AGO qui décidera que la cible remonte sous forme d’une distribution exceptionnelle de dividende, la somme décidée à la holding.
2-La réduction de capital
Dans le cas d’une trésorerie excédentaire, et depuis une récente décision du Conseil constitutionnel, il est aujourd’hui possible, certes sous certaines conditions, de ressortir ces capitaux par une réduction de capital avec rachat par la société de ses propres titres. Soulignons que, cette opération est taxée selon les règles des plus-values sur cessions de titres.
Attention au bon calibrage de l’opération
En effet il ne faudrait pas altérer les besoins de cash de la société cible.
En effet si la distribution met en péril la société, son développement futur, ou ne correspond pas à l’intérêt général de celle-ci, alors la responsabilité des dirigeants qui autorise cette distribution pourrait être engagée. Le repreneur, personne physique, engage également sa responsabilité de mandataire social en cas de distribution de dividendes contraire à l’intérêt social de la société.
L’article L 225-216 du Code du Commerce dit que : » Une société ne peut avancer des fonds, accorder des prêts ou consentir une sûreté en vue de la souscription ou de l’achat de ses propres actions par un tiers « .
Il existe bien un risque d’abus de biens sociaux ou de majorité. Notamment si la trésorerie de la cible est remontée sans discernement, et sous forme de « prêt » à la holding de reprise. La remontée de trésorerie sous forme de compte courant de la cible pour financer en partie l’acquisition, est interdite par l’article sus mentionné.
Le plus sûr moyen de remonter de la trésorerie d’une société cible vers la holding de reprise, réside donc bien dans une distribution de dividendes, dite exceptionnelle, ou une distribution de réserves.
Cette opération devra se faire au regard des précautions mentionnées, et dans l’estimation du montant pour ne pas mettre en péril la société en cas de baisse de régime de sa filiale opérationnelle. .
Remontée de trésorerie après la reprise
La question que se pose nombre de repreneurs est de savoir s’ils ont la possibilité d’utiliser la trésorerie de la société acquise pour rembourser les échéances de la dette d’acquisition. Bien entendu, le repreneur peut utiliser la trésorerie de la société reprise pour rembourser la dette d’acquisition. C’est même là le schéma typique des montages LBO.
La solution la plus utilisée et la plus avantageuse sur le plan fiscal consiste à mettre en place une convention de gestion de trésorerie entre la holding et sa filiale ce qui permet à la holding de disposer des excédents de trésorerie générés par sa filiale. Dès lors, la holding pourra opter pour un remboursement mensuel de ses échéances d’emprunt . Et ainsi, minorer la charge d’intérêts. Bien entendu, la société cible doit dégager suffisamment de résultat et de cash disponible pour distribuer le montant de dividendes prévus au plan de financement initial de l’opération.
Autre point de vigilance
Un autre point de vigilance porte sur le rythme de remboursement de la dette : attention à la dette remboursable in fine qui nécessite d’avoir la rigueur de constituer au fur et à mesure les réserves de trésorerie suffisantes pour pouvoir honorer l’échéance. Il est important pour la tranquillité du repreneur et la réussite du LBO (ou de la reprise) de capitaliser la société holding de reprise pour ne pas la mettre en risque.
Pourquoi le cédant laisse-t-il une trésorerie parfois importante dans l’entreprise ?
Laisser de la trésorerie dans la société peut simplement relever du souhait de laisser au repreneur une entreprise saine et apte à se développer. Mais, il peut y avoir également une raison fiscale non neutre. En effet, le cédant personne physique se distribue la trésorerie excédentaire avant de céder. Alors il sera taxé dans la catégorie des revenus mobiliers (soit actuellement : abattement de 40% et application du barème de l’impôt sur le revenu pour le solde).
Alors que si le cédant laisse la trésorerie dans la société qu’il cède, son gain net retiré de la vente devient imposable en tant que plus-value avec application des dispositions prévues à l’article 150-0 du CGI.
Il peut, si les conditions de forme et de fond sont respectées, bénéficier des abattements pour durée de détention. Même voire des abattements renforcés et de l’abattement fixe spécifiquement prévus pour le dirigeant partant à la retraite.