Reprise : les clés de la réussite

17 février 2009

Isabelle Marie

Énoncer que la reprise d’entreprise s’assimile à un parcours du combattant devient un lieu commun. Certains repreneurs vivent pourtant ce processus long et complexe fort bien. Pour d’autres, il est vrai, ce long cheminement vers le siège de dirigeant d’une PME engendre stress et angoisse. Les quelques conseils qui suivent, qui émanent de professionnels de la reprise et de repreneurs, pourront contribuer à aiguiller le porteur de projets sur la voie de la réussite.
Avant de s’engager dans un projet si impliquant pour soi et pour ses proches, le repreneur potentiel ne peut faire l’économie d’une véritable introspection. Il se doit d’analyser ses motivations profondes, tenter d’envisager les diverses conséquences de son choix et définir le plus précisément possibles ses objectifs. Après avoir pris conscience de la réalité d’un marché de la transmission des PME relativement congestionné, où l’on dénombre un cédant pour 5 repreneurs, et de ses réelles capacités financière, le porteur de projet pourra se lancer cette aventure entrepreneuriale.
Il suivra avec profit une formation, courte ou plus longue selon le projet de reprise, telle que celles dispensées, à titre d’exemple, par EM Lyon, l’Essec, HEC, le CRA ou encore les chambres consulaires. Les ressorts humains et psychologiques de la reprise y sont analysés, ce qui se révèle fort instructif pour le porteur de projet.
Le repreneur sera alors armé pour engager la période de prospection. « Cette phase nécessite véritablement une activité à plein temps qui est très demandeuse de temps et de concentration. Elle engendre du stress et des doutes, note Olivier Flahaut, repreneur de la société Incidence. Il est important que la famille soit à 100 % derrière vous. Il faut considérer cette étape comme une période professionnelle et non pas juste comme une transition. Elle vous permet de consolider votre projet et vos connaissances. Le stress grandit avec le temps qui passe et le temps passe très vite. Il faut se préparer à ce que la recherche soit longue. Il est prudent de planifier 24 mois. C’est d’ailleurs une bonne chose que l’indemnisation des Assedics s’étale sur 23 mois ».

> Budgeter le coût des conseils
L’accès aux opportunités dans un marché où la discrétion, voir le secret, est érigée en règle cardinale, n’est certes pas aisé
. Les bons connaisseurs de la transmission sont unanimes pour dire l’importance de se constituer un réseau et de ne surtout pas s’isoler chez soi derrière son ordinateur. Les cabinets de rapprochements, les chambres de commerce et d’industrie, les clubs de repreneur, les salons consacrés à l’entreprise, mais aussi son environnement personnel doivent être sollicités avec pugnacité, d’aucun diront avec un certain acharnement.
« Les experts-comptables, les notaires et les banquiers sont ceux qui sont au courant de l’envie du cédant de transmettre, mais ces professionnels communiquent peu. Il s’agit d’un marché captif. Il est vrai que ce n’est pas simple pour le repreneur. Il n’y a pas d’entrée unique. Il ne faut surtout pas hésiter à rencontrer tous les réseaux, par exemple les syndicats professionnels », souligne Jacques Sounaleix, coordinateur de Limousin Entreprendre et référent national reprise.
Même si le repreneur pense avoir trouvé la bonne cible, il est très important de continuer en parallèle ses recherches, car un dossier peut ne pas aboutir quel que soit le stade des négociations. L’accompagnement devient nécessaire. « Il est important de se faire accompagner car les différents conseils ne sont pas parties prenantes de la reprise et ont donc une vision plus distante et rationnelle qu’émotive du dossier, poursuit Olivier Flahaut. Il faut bien choisir son expert-comptable, car tous n’ont pas le même profil. En plus de l’avocat, j’ai fait appel à un troisième conseil, un accompagnateur spécialisé dans la reprise d’entreprise. Il faut budgeter le coût des conseils à hauteur de 5 %. Cela fait ainsi parti des éléments à financer

> Appréhender les moins-values
Le diagnostic détaillé de l’entreprise est bien sûr une phase fondamentale
. Outre l’aspect financier, il est nécessaire d’aborder les problématiques humaines, techniques, organisationnelles, environnementales, de sécurité et de mise en conformité réglementaire. L’importance de ces derniers aspects est souvent sous-estimée. « J’estime que ce travail doit être mené par le repreneur lui-même afin qu’il connaisse bien l’entreprise et qu’il soit apte à la diriger immédiatement après la vente. C’est à ce moment que le repreneur peut appréhender les moins-values de la cible et elles peuvent s’avérer importantes », estime Jacques Sounaleix.
Si la cible est en adéquation avec le profil et la surface financière du repreneur, si le business plan s’avère cohérent, la recherche de financement ne constitue pas l’étape la plus difficile de l’ensemble du processus. Le banquier sera généralement plus confiant dans une opération de reprise que pour une création, car il ne part pas dans l’inconnu. Il peut en effet s’appuyer sur plusieurs bilans de la société cible. Toutefois, le repreneur ne doit surtout pas penser que la partie est gagnée d’avance.
« Nous attachons une grande importance au profil du repreneur, à sa personnalité, à sa motivation et à son engagement. Pour nous un bon profil est au moins aussi important que la cible. Nous aimons bien qu’il y ait une continuité entre son parcours professionnel et son projet. Connaître bien le secteur permet d‘éviter bien des aléas, souligne Thierry Hohweiller, directeur de l’agence entreprise d’Évry du groupe Caisse d’Épargne. Il faut que le repreneur soit très précis sur l’activité même de la cible et de son marché. Nous-mêmes allons la situer dans un contexte plus large et mesurer la capacité d’évolution du secteur ». Il explique le niveau de fonds propres doit être supérieur à 20 %. Car la capacité d’autofinancement doit être suffisante pour rembourser l’emprunt, mais aussi pour permettre à la cible de continuer à investir. Donc si la capacité d’autofinancement est trop entamée par le remboursement de la dette holding, ce qui peut être le cas si l’apport est trop faible, la santé financière de la société peut en pâtir.