Reprendre dans la formation

20 octobre 2010

Isabelle Marie

""Dynamique, hétérogène, dispersé, très mouvant… les qualificatifs ne manquent pas pour décrire le marché de la formation professionnelle continue. « Il est porté par des facteurs structurels de croissance : accélération du rythme de l’innovation, démocratisation de la formation dans les entreprises, stratégies RH tournées vers l’optimisation du capital humain, évolutions favorables de la réglementation… », note David Targy, auteur d’une étude sur les stratégies et mutations des organismes à l’horizon 2015. Toutefois, la crise a fait vaciller de nombreux acteurs, tributaires de la santé financière de leurs clients. « Nous avons enregistré une baisse d’activité de 20 % entre 2008 et 2009 et de 60 % depuis 2009 », témoigne Guillaume Bordeaux Montrieux, qui a racheté en mai 2005 Uniform’PN, un institut formant au métier de personnel navigant commercial.

> Un marché dispersé
Le marché est largement dispersé. « Il existe une nébuleuse de petites structures – on compte environ 7 000 formateurs indépendants – à côté de quelques grands de la formation », observe Elisabeth Vinay, consultante à l’Agence pour la création d’entreprises (APCE) et auteur de la fiche métier « Entreprendre dans la formation professionnelle ». Mais comme souvent en pareil cas, l’activité est très concentrée. Les organismes réalisant plus de 750 000 euros de chiffres d’affaires (soit 12 % des organismes) totalisent en effet 74 % du chiffre d’affaires et ils accueillent 62 % des stagiaires.
Accompagnement, orientation, formation, évaluation… La palette des métiers est, elle aussi, très large. Deux tiers des stagiaires sont des salariés. Les entreprises ont acheté pour 2,9 milliards d’euros de formations auprès d’organismes, dont 1,9 milliard directement et 1 milliard par l’intermédiaire des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), chargés de mutualiser les fonds des entreprises pour la formation continue . La principale autre source de revenu des organismes provient des formations subventionnées par les pouvoirs publics qui représentent 28 % du CA. Autant dire que l’on ne peut adopter ni la même approche commerciale et ni le même modèle économique face à ces interlocuteurs.

> Un marché difficile à pénétrer
Les experts sont unanimes : pour un repreneur, ne pas être issu du secteur constitue un handicap lourd sauf à avoir un carnet d’adresses bien fourni (DRH, responsables formation, chefs d’entreprises…). Par ailleurs, répondre aux appels d’offre publics est un travail fastidieux d’autant que chaque région procède différemment. « Il faut accomplir des tâches récurrentes et chronophages », explique Jérôme Lebrec. Il est surtout extrêmement difficile à pénétrer même pour qui bénéficie de soutiens. « En 2004, nous étions présents dans trois régions. J’ai tenté d’élargir notre maillage. Résultat : j’ai échoué sur l’une des régions que je visais alors que j’avais l’appui du Fafih (organisme paritaire collecteur agréé de l’industrie hôtelière), de certains syndicats professionnels et grands groupes hôteliers… J’y suis parvenu en Rhône-Alpes par un moyen détourné : j’ai racheté un organisme à la barre du tribunal de commerce », relate Jérôme Lebrec. Aussi attractive soit-elle, la formation professionnelle est donc un marché complexe. « Je ne pense pas qu’il y ait beaucoup d’entrepreneurs qui fassent fortune dans ce secteur. Il faut y aller par amour », conclut Jérôme Lebrec.

> Chiffres clés
– En 2006, 13 773 organismes avaient pour activité principale la formation professionnelle continue.
– Les organismes du secteur privé ont formé 80 % des stagiaires soit 8 millions de personnes.
– Ils ont réalisé un chiffre d’affaires de 5,9 milliards d’euros (+4 % comparé à 2005).
– 51 % des prestataires réalisent un CA inférieur à 75 000 euros, 14 % un CA compris entre 75 000 et 150 000 euros, 23 % un CA compris entre 150 000 et 750 000 et 12 % un CA supérieur à 750 000 euros.
– Pour une heure-stagiaire, le chiffre d’affaires moyen est de 11 euros dans le secteur privé non lucratif et de 9 euros dans le secteur privé lucratif.