Pourquoi tout miser sur l’innovation ?

5 février 2008

Isabelle Marie

Afin de gagner ce fameux point de croissance, les pouvoirs publics ne misent-ils pas un peu trop sur l’innovation ? Il est frappant de constater que la quasi-totalité de la dotation de l’Etat à Oséo, qui a doublé par rapport à 2007, sera consacrée cette année en aides et subventions aux entreprises innovantes. Certes, explique-t-on chez Oséo, l’innovation n’est pas bornée de façon stricte. Certes, le concept d’innovation est étendu, notamment, aux notions de services et de marketing. Il paraît pourtant probable que les entreprises technologiques seront les principales bénéficiaires de cette manne de 800 millions d’euros qui sera distribuée par l’agence publique.
Mais les secteurs high-tech, et leurs entreprises innovantes, sont-ils bien les moteurs du développement économique et de la croissance ? Rien n’est moins sûr. Rares sont d’ailleurs les sociétés de ces secteurs qui atteignent une taille critique. Comme l’indique Philippe Albert, dans « L’Art d’Entreprendre » (éditions Village Mondial), nombre d’études ont clairement démontré que les PME à forte croissance, pourvoyeuses d’emplois et de richesses, appartiennent pour la grande majorité d’entre elles à des secteurs traditionnels comme les services, la distribution ou encore les transports. Ces mêmes entreprises sont souvent très innovantes sans toutefois posséder de service R&D et sans déposer de brevet. Le processus d’innovation est, chez elles, une démarche constante et résulte de multiples sources. Mais ces PME ne bénéficieront sans doute pas des aides de l’Etat aux entreprises marquées du sceau de l’innovation, car ne correspondant pas aux critères définis en hauts lieux.
Pourquoi alors ne pas répartir de façon plus harmonieuse et équilibrée la nouvelle manne d’Oséo ? Ces centaines de millions d’euros pourraient aussi être orientés vers les entreprises de croissance, quel que soit leur secteur d’activité, afin d’accélérer leur rythme de progression. Nombre d’entre elles pourraient alors briser ce plafond de verre récemment pointé par Hervé Novelli. Oséo pourrait aussi consacrer une part de ses ressources à favoriser les reprises entre entreprises, afin qu’elles atteignent une taille critique les rendant alors plus compétitives à l’export. La croissance ne doit pas s’assimiler exclusivement à l’innovation.