Les vertus de la crise sur le marché de la reprise

30 septembre 2008

Isabelle Marie

Nos repreneurs et nos cédants ont-ils encore le goût de se mettre à la table de cession d’entreprises. Quand on observe la réalité des opérations de transmission de PME, on peut sérieusement en douter.
Du côté des repreneurs, on observe un recul des demandes de formation, une réelle difficulté à repérer le « bon » dossier, une tergiversation grandissante à proposer une offre, une défiance accrue vis-à-vis de la cible convoitée, et pour achever ce tableau très velléitaire, la conviction que, en toutes hypothèses, «les banquiers ne suivront pas».
Les cédants quant à eux se cachent plus que jamais. S’ils sont à la tête d’entreprises qui marchent bien, ils se cachent en reportant leur décision de mettre en vente parce qu’ils ont le sentiment que « ce n’est pas le bon moment » pour vendre à bon compte. S’ils sont propriétaires d’entreprises qui se situent juste au-dessus de la ligne de flottaison, ils se cachent derrière un prix de présentation de leur affaire qui les éloigne définitivement de toute possibilité de proposition crédible. Restent enfin les entreprises en grande difficulté qui cachent difficilement leurs problèmes structurels derrière les maux de la conjoncture et des subprimes.
Quant au monde de la finance, il se replie discrètement et de façon très courtoise (comme d’habitude) en indiquant que rien ne change, mais que les dossiers feront l’objet d’un examen plus attentif désormais, que les ratios prudentiels devront être vraiment respectés et que les taux ne pourront plus être les mêmes…
Bref, dans ces conditions, que peut-on réellement espérer en dehors d’une embellie hypothétique et dont la date exacte appartient au domaine de la géométrie variable. Je vois quant à moi trois signes positifs possibles.
Tout d’abord, je pense que le marché va «s’auto nettoyer », en éliminant tous ceux et tous les systèmes artificiels qui faisaient croire qu’on pouvait gagner facilement de l’argent sur le dos des autres par un simple jeu de «clic-clac ». Je fais référence non seulement à toutes sortes de conseils et intermédiaires, mais aussi à des vendeurs qui ne disaient pas toute la vérité sur leur entreprise, à des repreneurs qui mentaient sur leur réelle capacité technique et financière, et à des financeurs qui jouaient avec l’argent des autres sans connaître vraiment la réalité économique des dossiers.
Cette opération-vérité devrait permettre dans un deuxième temps de mettre en lumière une offre et une demande sérieuses, qui entraîneront avec elles une réponse raisonnable de la part des prêteurs. Ce mouvement, même faible, réanimera petitement, mais sûrement un marché assaini et assagi dans le cadre d’opérations de meilleure qualité et donc pérennes.
Enfin, il faut se rappeler que, dans une conjoncture difficile, il y a de bonnes affaires à réaliser. Car il existe toujours, dans tous marchés, des vendeurs qui se trouvent contraints de céder pour des raisons indépendantes de la qualité de leur société. Dans ce cas, on peut agir en étant à la fois prudents et opportunistes.
Ne désespérons donc pas de la crise, et n’oublions pas que l’appétit (re)vient en mangeant, et que les vrais entrepreneurs contribueront à relancer progressivement la machine.