Certains aiment agir et faire avancer les choses, quitte à abandonner une partie de leurs positions en acceptant le compromis. D’autres préfèrent s’opposer, se retrancher sur l’Aventin du bien «absolu» (qu’ils se persuadent évidemment de représenter), et ne céder en rien, quoi qu’il en coûte.
Cette dichotomie d’attitude s’applique à bien des activités humaines, partout où il existe un enjeu, un désir de «gagner» à sa cause quelqu’un ou quelque chose. La négociation de la cession d’une entreprise constitue un très bon exemple de ce genre de dialectique qui dérape fréquemment (trop fréquemment) en «sport» de combat.
Mais peut-on, doit-on éviter l’ «opposition» des points de vue du cédant et du repreneur ?
Je pense que la confrontation est inévitable tant les positions de départ sont nécessairement antagonistes : le cédant quitte le navire qui a représenté l’essentiel de sa vie et de sa «valeur», le repreneur le remplace en ignorant une bonne part des qualités (et des défauts) du bateau, et sans bien connaître la mer qui l’attend. Les deux prennent donc un risque élevé, ce qui génère inévitablement un «frottement» potentiellement explosif de deux angoisses fortes (l’une correspondant à la perte du passé, et l’autre à la crainte de l’avenir).
Dès lors il est vain d’ignorer le problème, et inutile de vouloir l’éviter, car il ré-apparaîtra tôt ou tard au détour d’un menu détail qui surgira lors du long processus de «rapprochement».
La bonne attitude consiste donc à maîtriser cette situation particulière. Mais il est bien clair que cette maîtrise ne peut être le fait de ceux qui sont dans l’arène, trop impliqués, et sans la distance qui conditionne l’objectivité. Seuls les «conseil » sont capables de mener à bien cet exercice d’équilibriste qui consiste à garder son sang froid, à relativiser les différends, à se mettre à la place de l’autre, et finalement à rechercher l’accord plutôt que le désaccord.
Cette souplesse indispensable des conseils exige deux qualités rares : la compétence (car il convient de dépasser sa propre expertise pour embrasser de façon équilibrée tous les aspects économiques, sociaux, juridiques, psychologiques) et l’esprit de sacrifice (car dans ce «jeu» on peut perdre son client).
En ce moment je rencontre davantage de «deal-breakers» que de «deal-makers» ! Est-ce le signe conjoncturel d’un marché rare et tendu, ou bien le reflet structurel d’un manque d’ «éducation» ?
A vous d’en juger.