Le patrimoine global d’un entrepreneur ne se gère sûrement pas comme celui d’un cadre d’entreprise

1 avril 2008

Isabelle Marie

Les dernières réformes en date issues de la loi de finances pour 2008 – le nouveau régime d’imposition des dividendes et l’augmentation du taux d’imposition des plus-values réalisées lors de la cession de valeurs mobilières de placement – sont une touche de plus aux importantes modifications apportées à notre système fiscal par le législateur depuis quelques années.

Ces nouveautés législatives influent profondément, notamment par une baisse de taux, sur les différents modes de transfert de la richesse produite par le patrimoine professionnel d’un entrepreneur vers son patrimoine privé.

Avant de faire une esquisse de l’actuel paysage fiscal du transfert professionnel privé, il est bon de rappeler l’importance de ce transfert dans le cadre d’une gestion globale équilibrée du patrimoine d’un entrepreneur.

Ce rappel nécessite auparavant une mise au point claire : il existe aujourd’hui des funambules du conseil en tout genre qui confondent stratégie et “acrobaties“, “acrobaties“ qui génèrent des conséquences patrimoniales indésirées et toujours leurs propres enrichissements.

“L’acrobatie“ c’est :
– la vente à soi-même pour “se rémunérer par des plus-values et pas par des salaires“,
– réaliser des plus-values parce que “de toute façon votre patientelle ne vaut rien“,
– créer des démembrements temporaires avec des évaluations d’usufruit économique qui sont plus proches, en droit fiscal, de l’acte anormal de gestion, et, en droit des sociétés, de l’abus de bien social que de la réalité économique,
– utiliser sans discernement les locations aménagées réalisées par des SARL de famille relevant des dispositions de l’article 8 du Code Général des Impôts,

et bien d’autres “montages“ encore qui, parce qu’ils poursuivent qu’un but exclusivement fiscal, sont souvent des contresens patrimoniaux.

La “palme d’or“ de ces montages revient sans discussion possible à la création par apport des titres d’un holding afin d’échapper à la taxation des plus-values de cession de ces titres, création qui conduit après cession à constater que le prix est enfermé dans ce holding.

Ne pas transférer, afin d’éviter un coût fiscal immédiat, est tout autant fautif. Pour autant, bien sûr, qu’il ne crée pas de problèmes financiers à l’entreprise, le transfert est essentiel pour les raisons suivantes :

– il se fera tôt ou tard, or retarder l’inéluctable n’est pas forcement le gage d’un moindre coût,
– la fiscalité pesant sur les revenus du patrimoine est pour l’essentiel peu élevée – même les revenus fonciers bénéficient d’un système d’amortissement,
– il permet la mise en place d’une protection efficace de la cellule familiale,
– il permet d’envisager l’enrichissement du patrimoine des enfants,
– il permet enfin l’anticipation des problèmes de transmission de patrimoine et de retraite.

Mais ce transfert a toujours un coût qu’il convient bien sûr de chercher à baisser même si le législateur a depuis quelques temps œuvré en ce sens.

Ainsi :
– le nouveau barème de l’impôt sur le revenu, qui pour des raisons de constitutionnalité n’a pas été assorti de la suppression des “niches fiscales“ et a eu pour effet de faire baisser la tranche marginale de plus de 49% à 40% mais surtout baisser le taux moyen d’imposition,
– le bouclier fiscal visé à l’article 1 du Code Général des Impôts,
– le nouveau mode d’imposition des plus-values immobilières qui ramène le délai d’exonération de fait de 22 ans à 15 ans,
– la refonte du régime des plus-values réalisées par des petits entrepreneurs relevant de l’IR (et en 2014 de l’IS).
– L’exonération des plus-values réalisées lors du départ à la retraite …

Si le transfert est réalisé, il reste à gérer la “richesse“ dans le patrimoine privé. C’est un autre problème, à ne pas confier au hasard, car le patrimoine global d’un entrepreneur ne se gère surement pas comme le patrimoine d’un cadre d’entreprise ou d’un retraité.