Dans le petit monde de la cession-acquisition, l’ambiance est morose. Les cédants se font rares. Ils attendent que l’économie reparte, ils hésitent à exhiber les contre-performances liées à la chute de leurs commandes en 2008 et 2009 et espèrent des jours meilleurs ! En conséquence, dans les affaires proposées à la vente, on trouve une proportion anormalement élevée de mandats pour des entreprises en péril. Pour celles- là, les chances de trouver une solution restent bien minces. Coincées entre de rares repreneurs frileux qui leur offrent une « poignée de cerises » et des banquiers qui partent en courant, ils ne leur restent plus qu’à quêter l’hypothétique « friend money ».
En revanche, la situation des entreprises restées en « bonne santé » durant cette période de crise aiguë est à bien des égards enviable sur le marché de la transmission. On constate en effet que, pour les dirigeants ayant su préserver (par talent ou par chance) chiffre d’affaires et rentabilité, il existe bien une forme de rigidité à la baisse (présupposée) du prix de cession.
Pour quelles raisons ? J’en vois trois principales. Tout d’abord, compte tenu du climat économique actuel, les « belles » entreprises désireuses de changer de main constituent des exceptions par rapport à une offre atone et de piètre qualité.
En second lieu, ces entreprises se trouvent doublement courtisées, non seulement parce qu’elles sont très peu nombreuses, mais de surcroît parce qu’elles obtiennent des résultats atypiques qui leur confèrent un véritable brevet de résistance à toute épreuve. Les repreneurs sont donc très sensibles à leur indiscutable attrait, et se retrouvent davantage à se les disputer. Ceci est d’autant plus vrai que les repreneurs sérieux et argentés ont vu ces trois dernières années leur « temps d’attente » augmenter sensiblement. Ils sont donc contraints, à un moment donné, d’agir, et à sortir du bois.
Enfin, les financeurs en haut et en bas de bilan, après avoir éliminé de leur champs d’intervention la plupart des dossiers jugés médiocres ou risqués, sont finalement bien aises de justifier leur présence et leur métier par quelques interventions musclées sur une « bonne cible ».
Conclusion, les chefs d’entreprises dont les sociétés sont encore des « pépites » peuvent se réjouir. La valeur de leur actif n’a pas réellement baissé. Ils bénéficient d’une conjoncture favorable tant du côté de l’offre que de la demande. Dès lors, la situation des repreneurs devient cornélienne : vaut-il mieux attendre en regardant passer les trains, ou bien acheter à bas prix une affaire en difficulté dans une conjoncture catastrophique, ou bien acquérir à prix élevé une société solide ? Décidément, le monde de la transmission n’est pas un monde facile.