De DG à patron

18 février 2009

Isabelle Marie

""Titulaire du diplôme d’ingénieur de l’Ecole supérieure du bois (ESB), Loïc Bréhu, 55 ans, a repris le groupe Lorillard, à Chartres, spécialisé dans les menuiseries extérieures. Il a construit sa carrière en occupant plusieurs postes de directeur technique : « J’ai passé deux ans dans une entreprise de menuiserie en Côte d’Ivoire, puis 10 ans au sein d’une filiale de Moulinex en France, avant une brève expérience de deux ans comme directeur d’exploitation chez un concurrent de Lorillard… » C’est alors qu’il est remarqué par Jean Lorillard, qui en fait, à la fin des années 90, son directeur technique puis son directeur général, en 2004. « Personnellement, je n’ai jamais pensé à reprendre une société jusqu’à il y a cinq ans, confie Loïc Bréhu. J’ai toujours assuré ma fonction de cadre dirigeant avec plaisir et enthousiasme et, de plus, lorsque je suis entré dans le groupe Lorillard, celui-ci devait être repris dans le cadre d’une transmission familiale… »

> La reprise
« Le fort développement du groupe Lorillard a obligé le fils du cédant à décliner la succession, devenue plus complexe », raconte Loïc Bréhu. Dès lors, Jean Lorillard explore d’autres possibilités pour céder son groupe, dont il s’ouvre à son directeur général, proche collaborateur. « Beaucoup de solutions ne lui convenaient pas, car en trop forte rupture avec les 70 années d’histoire familiale de l’entreprise… » A la faveur d’une rencontre avec Michel Fraisse (dirigeant de la société d’investissement MFGI), une nouvelle opportunité se présente alors : « Nous nous sommes demandé si nous ne pourrions pas envisager une reprise par un groupe de salariés autour de moi… Et je me suis déclaré partant pour un LBO en février 2006, tout juste un an avant la reprise ! » Loïc Bréhu ne se pose alors que très peu de questions : « Je connaissais parfaitement Lorillard et cela devenait une sorte d’aboutissement qui me permettait d’influer davantage sur la vie de la société. J’ai donc pris 21% du holding de reprise, une trentaine de salariés triés sur le volet a pris 20%, le cédant 10%, MFGI 26% et cinq autres investisseurs particuliers 23%. »

> Le point de vue du repreneur
« Ma seule crainte, au moment de reprendre, était que les autres salariés ne me suivent pas, confie Loïc Bréhu. Car il faut être entouré ! » Autre difficulté rencontrée : la valorisation. « Nous sommes partis d’un écart de 20% entre le prix demandé et celui que je pouvais consentir à payer. » Pour le reste, c’est naturellement que Loïc Bréhu est passé de DG à PDG du groupe Lorillard, via un apport lié pour 70% au résultat des actions déjà détenues et pour 30% à un emprunt bancaire. « Le poids de la responsabilité de la succession n’a pesé sur mes épaules que quelques jours. Ensuite, j’ai rapidement pu imposer ma patte, en adoptant par exemple une stratégie de développement interne et externe (vers des métiers complémentaires) à laquelle je pensais depuis plusieurs années. » Si bien que le groupe, qui réalise aujourd’hui 96 millions d’euros de CA avec 550 salariés, ne cesse de grandir. « Nous préparons déjà la sortie du premier LBO, tandis que 40 salariés supplémentaires pourraient, eux, faire leur entrée au capital. »

> L’entreprise cible
Le Groupe Lorillard a été fondé près de Chartres par André Lorillard en 1936, qui a passé le relais à son fils, Jean, en 1975. Ce dernier est resté aux commandes jusqu’en 2007, en spécialisant notamment l’entreprise sur les menuiseries extérieures et en en faisant, progressivement, l’une des dix plus importantes sociétés françaises de menuiserie industrielle sur mesure. Lorillard est ainsi devenue la première entreprise indépendante du secteur, en déclinant son offre dans trois matériaux (200 000 pièces par an, en bois, PVC et aluminium) et en opérant simultanément sur trois marchés : les grands chantiers avec Lorillard Entreprise, les particuliers avec Lorenove et les professionnels du bâtiment avec Lorebat.