De plus en plus de cédants vendent leur entreprise pour un autre motif que le départ en retraite. Loin de partir au soleil, la plupart d’entre eux poursuivent leur aventure entrepreneuriale.
Certes, le départ en retraite demeure la raison principale pour la vente d’une entreprise. Toutefois, depuis quelques années, le nombre de cessions pour d’autres motifs progresse régulièrement. D’après les derniers chiffres de la CCI de Paris, et de son réseau « Passer le relais », le départ en retraite est à l’origine de 38 % des cessions et l’anticipation de la retraite est la raison de 21 % d’entre elles. Les cessions pour projets personnels et changement d’activité représentent plus de 25 % des cas. Au total, les cessions pour d’autres motifs que la retraite représentent pas moins de 41 %
Tous les professionnels s’accordent à dire que les affaires tournent plus vite aujourd’hui qu’auparavant. Les experts de l’APCE considèrent qu’un peu moins d’une entreprise sur deux se vend dans le cadre d’un départ à la retraite. Donc 50 % se vendent dans un autre contexte. Mais il existe une certaine disparité selon les secteurs d’activité. A titre d’exemple, les hôtels et restaurants se revendent beaucoup plus rapidement que d’autres entreprises.
> Différents cas de figure se rencontrent.
En cas de succès dans leur parcours entrepreneurial, certains dirigeants ont envie de réaliser leur patrimoine avant que leur entreprise ne décline. Nombreux sont les exemples de chefs d’entreprise se trouvant sur une niche et qui ont été approchés par de grands groupes. Ceux-ci leur ont proposé un prix souvent attractif. Certaines situations poussent ainsi à la vente : marché en phase de concentration, parts de marché prenant de la valeur, etc. Deux solutions sont alors possibles : devenir manager au sein du groupe qui a racheté tout en récupérant un petit pactole ou bien partir avec le produit de la vente.
« Souvent les PME qui se développent rapidement peuvent éprouver des difficultés à gérer cette croissance, en particulier sur le plan administratif et des ressources humaines. De même, il faut pouvoir financer la progression du besoin en fonds de roulement et de la trésorerie », explique Fabrice Barrier, expert-comptable associé au sein du groupe Strego. La solution passe alors par le rachat par un groupe plus important.
> Un phénomène de lassitude
Tous les bons connaisseurs de cette problématique de la transmission des PME pointent un facteur commun à bon nombre de ces dirigeants qui cèdent en cours de parcours professionnel : une certaine lassitude. Il ne s’agit pas toujours de la raison principale, mais cette cause revient dans le discours de beaucoup. « Ils peuvent être fatigués de tout porter. Souvent, ils éprouvent des difficultés à embaucher ou encore pour véritablement s’appuyer sur certains collaborateurs. Beaucoup disent avoir connu des soucis sur le plan des ressources humaines, des déceptions avec des salariés. Certains cédants expliquent que ce type de problème peut véritablement déstabiliser. Cette lassitude peut aussi venir du fait ne pas avoir le temps de profiter de la vie, et ce d’autant plus à l’heure des 35 heures », renchérit Sophie Delalande, chargée d’affaires au sein du cabinet Intercessio.
> Des aspects positifs
Quelles que soient les raisons de la cession, très peu de ces dirigeants, souvent quadragénaires, partent au soleil pour le reste de leurs jours. Outre ceux qui ont vendu à un groupe et qui l’intègrent en tant que manager salarié, beaucoup cherchent à reprendre une autre entreprise. « La plupart des cédants qui ont eu un parcours de création d’entreprise ou de reprise poursuivent par d’autres projets entrepreneuriaux. C’est même quasiment systématique et ce, pour des raisons d’envie, de moyens, de réseau ou de culture. Un chef d’entreprise qui a couronné son parcours par une belle vente dispose de tous les réseaux pour chercher de nouvelles affaires. Certains conservent leur holding et s’en servent pour repartir sur d’autres projets en récréant ou en rachetant », explique Yannick Hoche, responsable transmission-reprise de l’APCE.
Les motivations de ces « jeunes cédants » sont, par définition, bien différentes de celles d’un cédant «classique» partant en retraite. En conséquence, leur approche de la phase de vente de leur entreprise sera également différente. Le repreneur qui vise l’entreprise d’un tel cédant peut s’attendre à des négociations difficiles. Mais, il y a aussi des aspects positifs. « Dans le cas d’une vente à un repreneur personne physique, l’intérêt de ces affaires est que souvent elles ont été bien préparées pour être cessibles. Le cédant s’est attaché à ce que son entreprise soit organisée de manière à ce qu’un autre repreneur puisse facilement y entrer : organisation, présentation. Quand ce type de cédant a commencé à mettre l’affaire en vente, en général il va jusqu’au bout, reprend Yannick Hoche. Les négociations peuvent s’avérer plus brutales, mais aussi plus saines ».