De plus en plus de cédants vendent avant la retraite. Comment expliquez-vous ce phénomène ?
Nous rencontrons de plus en plus de cédants qui, à un moment donné, ont envie de faire autre chose, car cela fait des années qu’ils sont dans le même métier ; pour d’autres, ils ont hérité et souhaitent changer d’univers. Ils cèdent parfois par lassitude, parfois par découragement, mais aussi parfois par volonté de réaliser leur capital.
J’ai vu des cas où le cédant rachète une petite affaire en couple, ouvrent un gîte ou un hôtel. Des activités qui n’ont rien à voir avec leur affaire précédente, mais qui sont certainement moins lourdes, notamment en termes de gestion des ressources humaines. Ils cherchent alors à joindre l’utile à l’agréable. Sur les sept ou huit dernières années, et avec une accélération sur les trois dernières années, nous constatons un changement du comportement entrepreneurial. De même que les salariés, les jeunes dirigeants ont intégré le fait qu’ils ne vont pas forcément passer toute leur vie professionnelle au sein de la même entreprise. Il y a un changement culturel et générationnel.
Avec ces cédants souvent plus jeunes, les conditions de négociation sont-elles différentes ?
J’ai vu souvent le cas de cédants, n’étant pas trop pressé de réaliser leur projet, suspendre le processus de cession, car ils n’avaient pas obtenu ce qu’ils attendaient en termes de prix. Mais je ne pense pas que les négociations soient tellement plus compliquées qu’avec un cédant qui vend pour des raisons d’âge, car, dans ce dernier cas, l’affect est tellement important qu’il complique bien souvent les négociations.
Ils ont besoin d’un pécule suffisant pour réaliser leur projet, ils ne sont pas pressés. Donc, les conditions de négociation peuvent être un peu moins souples. Mais tout dépend du cas de figure. Lorsque l’on intègre un groupe, les négociations peuvent être plus souples, car le
prix de cession fait parti d’un ensemble ; il y a les conditions de collaboration du dirigeant au sein de ce nouveau groupe, il peut y avoir des participations croisées, etc.
C’est vrai que pour les repreneurs, la donne est tout de même un peu différente, car ce public de cédant, futur repreneur, qui est jeune peut être déconcertant. Ils ont en face d’eux quelqu’un qui peut avoir leur âge. Ils se demandent pourquoi le cédant cède si tout ce que ce dernier dit est vrai : bons résultats, bon potentiel, etc. »
Beaucoup de cédants vendent-ils à un groupe plus important ?
Il s’agit dans ce cas véritablement d’une démarche d’entrepreneur, opportuniste dans le bon sens du terme. Il faut de l’humilité et savoir réagir dans un marché donné. En cas de vente à une autre société, souvent le cédant désire rester dans la direction de cette dernière. Il s’agit vraiment d’une vision stratégique. Si j’intègre un groupe, je pourrai bénéficier d’économie d’échelle et de synergie. La conversion n’est pas toujours facile à vivre, mais cela peut être salutaire pour l’entreprise. Souvent au travers d’un rapprochement avec un plus gros, ils pourront être déchargés d’un quotidien qui peut s’avérer quelque peu pesant et qui les empêche finalement d’avancer et de développer leur entreprise