Apprendre à reprendre

16 février 2009

Isabelle Marie

Les formations conçues pour les repreneurs connaissent un succès grandissant au fil des années. Une illustration de ce phénomène parmi d’autres : Durant une quinzaine d’années, il n’existait que cinq Écoles des Managers, pas moins de vingt ont ouvert leurs portes sur les cinq dernières années. La fréquentation de l’Institut de la Transmission d’Entreprise (ITE), à l’instar des autres formations réparties sur l’ensemble du territoire, progresse également chaque année.
Les témoignages de repreneurs qui ont suivi ces formations vont, pour la grande majorité d’entre eux, dans le même sens. Avant de s’y inscrire, ils ne ressentaient pas une nécessité impérieuse de retourner sur les bancs de l’école estimant que leur expérience professionnelle, souvent acquise à des postes de responsabilité au sein de grands groupes, pouvait suffire. Pourtant, à l’issue de ces parcours d’enseignement, le bilan est largement positif. Les candidats repreneurs apparaissent même souvent surpris de ce qu’ils peuvent retirer du contact avec des professionnels de la transmission et de leur expérience, des relations nouées avec d’autres repreneurs, de l’apprentissage du métier du repreneur et plus tard de celui de patron. Au-delà des enseignements pratiques, l’un des grands mérites de la plupart des formations proposées est de faire prendre conscience à l’aspirant repreneur des différentes réalités propres à la reprise d’entreprise.
« L’un des principaux bénéfices est qu’ils puissent recadrer leurs projets en fonction de ce qu’il leur est permis d’espérer, sur le plan de leur profil , souligne Julien Morel, directeur exécutif de l’Institut de la Transmission des Entreprises (ITE) et d’Essec Venture. Ils se rendent alors compte de leur positionnement par rapport au marché de l’offre. » Jean-Jacques Brunet, responsable de la formation au CRA va dans le même sens : « Les candidats acquièrent une certaine technicité, ils apprennent assez pour pouvoir dialoguer en connaissance de cause avec les différents experts. Nous leur donnons conscience de leurs capacités et de leurs limites. Nos stagiaires qui ont évolué dans des grands groupes se rendent bien compte qu’ils vont devoir changer de monde ». 

> Ne pas se bercer d’illusions
L’un des bénéfices des ces formations à la reprise, qui sont bien entendu fort diverses en terme de durée et de contenus
, est de permettre au porteur de projet d’orienter ses recherches vers la cible qui lui correspond le mieux, voir, pour certains, d’emprunter une tout autre voie. « Cette formation doit être vue comme un accélérateur. Elle permet de choisir. A partir du moment où l’on choisit, on va plus vite, et ce, grâce à la définition du projet personnel. La deuxième source d’accélération tient au fait que le repreneur sera plus déterminé, plus crédible et plus légitime lorsqu’il va rencontrer le cédant," assure Michel Coster, directeur de l’incubateur d’EM Lyon et professeur en entrepreneurship. Selon son profil, son temps disponible, ses capacités de financement, ses attentes, le candidat repreneur s’orientera vers une formation plus ou moins longue..
« Le parcours dans le processus de reprise des candidats est divers : un tiers est déjà très avancé dans les négociations sur plusieurs cibles, un autre tiers se trouve en phase de contact et les autres n’ont pas véritablement commencé leur recherche. Parmi les aspirants repreneurs de l’ITE, beaucoup sont des patrons d’unité de production. Nous attirons beaucoup plus de cadres que d’autodidactes , poursuit Julien Morel, directeur exécutif de l’Institut de la Transmission des Entreprises (ITE) et d’Essec Venture. L’apport moyen personnel est de 250 000 euros. L’immense majorité veut être majoritaire. Sur le plan géographique, environ 60 % viennent de la région parisienne. »
Parmi les programmes plus longs, la formation dispensée par le CRA est l’une des plus anciennes puisqu’elle a été mise en place en 1994. Les candidats repreneurs qui l’ont suivi reprennent dans leur très grande majorité des entreprises comptant de 5 à 50 salariés. « Nous réalisons un entretien de sélection afin de voir s’ils sont armés intellectuellement et vraiment désireux de reprendre et qu’il ne s’agit pas d’une reprise par défaut. Ils sont capables d’investir 200 000 euros à titre personnel. La valorisation moyenne de la cible reprise s’élève à 800 000 euros et compte 17 salariés », précise Jean-Jacques Brunet, responsable de la formation au CRA. L’enseignement, soit 120 heures réparties sur 4 semaines, comprend 28 modules : de la recherche d’affaires aux audits approfondis et des montages juridiques et financiers au business plan. Les intervenants sont des professionnels en activité (experts-comptables, avocats, juristes…). 

> L’adéquation homme / projet
La philosophie des Écoles des Managers est quelque peu différente puisque le candidat repreneur doit se trouver en situation de reprise
avec une cible et donc un cédant bien identifié. « La formation s’étale sur 60 jours répartis sur une année. Le formateur aide le stagiaire à préparer la reprise de sa cible en particulier. C’est l’entreprise à reprendre qui sert de cadre pédagogique. Nous délivrons une formation d’accompagnement d’un processus qui existe. Les repreneurs qui suivent notre formation visent des entreprises de 30 à 100 salariés. Il faut que le repreneur ait accès à toutes les informations stratégiques et commerciales de l’entreprise qu’il souhaite reprendre », détaille Hervé Demazure, chef de service à la direction Formation Compétence de l’ACFCI .
Parmi les formations plus courtes, outre celle dispensée par l’Institut de Transmission de l’Entreprise, les candidats à la reprise, où qu’ils se trouvent sur le territoire, pourront aller frapper à la porte de leur CCI qui leur proposera la formule « 5 jours pour reprendre », qui permet une bonne approche du « métier » de repreneur.
Les taux annoncés de succès de ces différents programmes, c’est-à-dire la reprise d’une cible par le repreneur, sont élevés : ils dépassent les 50 %, soit bien plus que pour la moyenne des repreneurs. La possibilité de multiplier ainsi ses chances de réussite mérite bien quelques milliers d’euros d’investissement.